Transport/Corridor Abidjan – Lomé : des problèmes persistent

15 janvier 2014

Transport/Corridor Abidjan – Lomé : des problèmes persistent

Un car à la gare d'Adjamé en attendant le départ
Un car à la gare d’Adjamé en attendant le départ

L’axe Abidjan – Lomé via Accra est l’une des lignes internationales de la CEDEAO les plus fréquentée. Celle-ci débouche sur le corridor Cotonou – Lagos où transite chaque année des millions de passagers et une quantité tout aussi importante de marchandise.

Au départ de la gare routière d’Adjamé (Abidjan) pour Lomé via Accra, les passagers, commerçants, propriétaires de compagnies de transport et chauffeurs le savent de nombreux barrages ont été levés mais d’importantes entraves à la libre circulation des personnes et des biens subsistent. En effet le corridor Abidjan – Lomé est un axe où persistent trois problèmes majeurs : le racket en territoire ghanéen, la lenteur des services administratifs, sanitaires et douaniers sans oublier les nombreux barrages.

Le racket omniprésent

Losséni Doumbia est chauffeur international chez UTB (Union des Transporteurs de Bouaké). Voici quatre (4) ans qu’il rallie chaque semaine la capitale togolaise. Il nous explique que le premier obstacle sur la route des chauffeurs au départ d’Abidjan est le check-point de contrôle frontalier d’Elibou. Il déplore une perte énorme de temps lors du contrôle : entre deux heures et trois heures pour dédouaner les bagages et autres colis !

« Une fois le véhicule immobilisé, les agents des services de douane mettent un peu trop de temps pour le contrôle. Et lorsque nous nous plaignons ils nous disent qu’ils font leur travail. Nous comprenons bien que c’est important mais il faut éviter que cela traîne » plaide Losséni.

Le voyage par car vers Lomé est long, épuisant et reste toujours incertain avec les nombreuses bandes de coupeurs de route qui s’sévissent dans les différents pays de la CEDEAO. Chaque minute perdue à un barrage oblige les chauffeurs à conduire plus longtemps de nuit sur des tronçons côtiers fortement dégradés. Au-delà du corridor d’Elibou, l’entrée en territoire Ghanéen consacre un autre problème : celui du racket. A chaque corridor officiel ou officieux, les véhicules de transport doivent s’acquitter d’une somme d’un (1) Ghana Cedi (215 f CFA). Ce montant peut s’étendre jusqu’à 4 GHS Cedi selon les humeurs des agents des forces de l’ordre ghanéen !

Le racket persiste donc sur l’axe Abidjan – Lomé or le sticker de la CEDEAO sur un véhicule qui part d’un Etat membre vers un autre est un appel au respect de la charte de la libre circulation des personnes et des biens. Ce racket occasionne « des frais supplémentaires et des pertes pour les entreprises » se désole Koffi Konan Bernadin contrôleur général du transporteur DIT (Diaby Inza Transport).

« Il est clair que vous ne pouvez pas traverser un pays sans vous soumettre à des contrôles de la Douane et des forces de sécurité. C’est tout à fait normal. Mais le vrai problème c’est l’argent que nos convoyeurs sont obligés de payer chaque fois. Ils ont juste l’argent pour les frais de route et ils doivent encore sortir de l’argent pour satisfaire des hommes en uniforme » s’indigne contrôleur général de la DIT.

Il interpelle les autorités ivoiriennes et celles des organisations sous-régionales sur la nécessité de lutter contre ce fléau qui plombe le transport inter-états.

Avoir ses documents de voyage à jour

Face aux contrôles intempestifs passagers et commerçants au départ d’Abidjan pour Lomé sont priés d’avoir tous leurs documents administratifs. Les quittances et documents de dédouanement, passeports et carnets de vaccination internationale à jour pour éviter les pertes de temps aux différents corridors. Car l’autre problème c’est aussi des passagers qui voyagent sans carte d’identité et surtout ceux qui refusent de se faire vacciner. Les raisons évoquées sont liées à la religion ou à la tradition.

« Certaines personnes vous disent par exemple que les métaux ne doivent pas pénétrer leur corps ! Vous faites l’effort de leur expliquer les dangers qu’ils courent en refusant le vaccin. Ils vous répondent tranquillement qu’ils vont s’arranger avec les services sanitaires à chaque corridor. De l’argent pour passer d’un pays à un autre au détriment de sa santé : c’est difficile à admettre mais certains voyageurs le font » s’inquiète Kouadio Jean agent vaccinateur à l’INHP-Treichville, l’Institut Nationale d’Hygiène Publique.

Mme Wassagary Donaldine est une habituée de la ligne Abidjan – Lomé. Elle vient rendre visite à sa famille qui réside dans la capitale économique ivoirienne. Elle atteste que les voyageurs qui ont leurs documents administratifs à jour n’ont aucun problème. Bien sûr, elle déplore les pertes de temps au contrôle douanier surtout lorsque le car de transport est utilisé par les commerçants pour convoyer leurs marchandises.

« Lorsque vous avez votre carte d’identité ou votre passeport et votre carnet de vaccination vous n’avez pas de problème. Mais lorsque vous n’avez pas ces documents les agents des forces de l’ordre vous prendrons forcément de l’argent » nous explique Mme Wassagary.

Des voyageurs sans documents de voyage qui payent pour passer les barrages ? « Oui c’est une pratique courante » soutient un jeune convoyeur qui a requit l’anonymat. Sans toutefois nous donner le montant exact de cette « transaction » illicite, notre interlocuteur confirme que les voyageurs au départ d’Abidjan remettent aux convoyeurs une certaine somme d’argent pour « les frais de route de tous ceux qui  »ont des problèmes » ».

Débourser de l’argent pour corrompre un agent des forces de l’ordre voici ce que refuse de faire Mme Moronou une commerçante. Elle s’assure d’être dans la légalité pour ne pas souffrir du racket.

« Quand vous êtes commerçants, vous devez avoir vos quittances et vous assurer que vos marchandises sont correctement dédouanés. C’est la seule manière de voyager en toute tranquillité sur l’axe Abidjan – Lomé » nous indique la commerçante.

Un voyage tranquille entre Abidjan et Lomé, c’est également le souhait de Losséni Doumbia chauffeur à UTB. Il invite les autorités ivoiriennes et celles de la CEDEAO à donner un véritable sens à l’expression libre circulation des personnes et des biens. Cette entreprise passera par la lutte contre racket, une modernisation des équipements et méthodes de travail des services douaniers sans oublier une amélioration de la qualité du réseau routier inter-états.

SUY Kahofi

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