Camp de déplacés de Nahibly : difficile accès à l’eau potable
Face aux affrontements armés nés de la crise post-électorale de Décembre 2010, des populations en provenance des villes et localités de Bangolo, Duékoué, Bloléquin, Toulepleu, Guiglo…se sont retrouvés à la Mission Catholique de Duékoué afin d’y trouver protection et assistance. La promiscuité, les difficultés d’accès à la nourriture et aux soins ainsi que les décès quasi quotidien ont poussé les humanitaires et les autorités Ivoiriennes à trouver un site de replie répondant aux normes Internationales pour reloger les déplacés. Voici donc 8 mois environ que les déplacés de la Mission Catholique ont trouvé refuge sur ce site protégé par le bataillon marocain de l’ONUCI (MORBATT) et qui regroupe 907 ménages de 4557 personnes dont 386 femmes chefs de famille.
« Nous sommes obligés de nous rabattre sur les puits »
Si l’accès aux soins de base et à la nourriture sont en constantes amélioration, l’accès à l’eau potable reste difficile pour les familles du camp de Nahibly. L’absence d’une politique durable de gestion des questions d’eau et d’électricité sur le camp oblige les déplacés à rester des jours entiers sans eau potable. Kaha Martine est mère et chef de famille. Elle a une dizaine de personnes à sa charge et elle souligne que le manque d’eau potable rend difficile les corvées quotidiennes. « Nous pouvons rester des semaines entières sur le camp sans une seule goutte d’eau potable ! Il est difficile de boire, de faire la cuisine, de se laver…Regardez » nous dit la mère de famille en indiquant de dispositif de fûts servant de citerne au camp « voici trois jours cette semaine que le bladder est vide et nous sommes obligés de nous rabattre sur les puits et les mares qui entourent le camp ». Les propos de Kaha Martine sont consolidés par ce témoignage de Yéhé Nathalie une autre ménagère du camp. « Nous n’avons pas d’eau et nous sommes souvent obligés de consommer l’eau des puits or les médecins du camp nous disent que cette eau est très dangereuse pour notre santé. Nous en sommes également conscients mais que faire quand nos jerricanes sont vides ? » s’interroge la jeune femme.
Des problèmes d’ordre techniques et financiers
L’eau potable consommée dans le camp de déplacé de Nahibly vient de la ville voisine de Duékoué. Bien que le camp soit relié au système d’adduction en eau potable de la SODECI (Société de Distribution d’Eau de Côte d’Ivoire), des problèmes d’ordre financier et technique rendent difficile le ravitaillement du camp. Le premier obstacle est d’ordre climatique : les cours d’eau du département sont saisonniers. Les rares qui résistent à la saison sèche peuvent à peine couvrir les besoins des abonnés et pour y arriver l’eau ne doit pas transiter par le château d’eau ! « Au-delà du fait que les cours d’eau sont saisonniers, il y a le fait que la station d’épuration d’eau et le château construit depuis 30 ans ne peuvent plus répondre aux besoins de la population actuelle. Il y a eu très peu de projets d’extension de la station d’épuration or la population n’a cessée d’augmenter » nous explique SERY Dréféba, Chef de Centre de la SODECI de Duékoué. Le gouvernement Ivoirienne grâce au programme PPU (Programme Présidentiel d’Urgence) est en train de réaliser une nouvelle station d’épuration à Duékoué pour soulager les populations de tout le département. Malheureusement il faut attendre la fin du premier semestre 2012 pour la fin des travaux ; une situation qui n’est nullement faite pour arranger les nombreuses familles du camp de déplacés de Nahibly. Les problèmes techniques ne peuvent en aucun cas masquer la dette de l’Etat Ivoirien face à la SODECI. Le Gouvernement avait promis régler la consommation d’eau du camp de déplacés de Nahibly mais rien n’a été fait ! Pour une dette estimée à 4.799.659 f CFA soit moins de 10.000 $ US, des menaces de coupure totale d’eau par la SODECI plane sur le camp !
Les solutions à court et long terme
En attendant que des solutions ne soient trouvées à ces problèmes, le cluster WASH du camp dirigé par l’UNICEF tente d’approvisionner le camp en eau. Un système de water traking a été mis en place pour convoyer l’eau potable par camion citerne depuis une fontaine de la SODECI jusqu’au camp. Ce système reste très couteux mais reste la seule alternative pendant des mois entiers ! Le bataillon Marocain de l’ONUCI qui assure la sécurité du camp vient à la rescousse des populations en fournissant 10 m³ (10.000 l) d’eau/jour aux 4557 personnes qui occupent le camp ; un geste certes appréciable mais qui reste en dessous des besoins du camp. Les déplacés du camp ont eux-mêmes creusés trois puits autour du camp et l’eau recueilli est chlorée, débarrassée des germes fécaux et désinfectée par l’UNICEF mais elle est ne doit servir qu’aux bains, lessives et vaisselles. Le cluster WASH du camp de Nahibly plaide auprès des humanitaires pour que des forages soient réalisés sur le site afin que l’eau des nattes plus saine puisse servir aux déplacés avant leur retour. Ce projet est à l’étude puisse que le site sur lequel le camp est positionné appartient à un particulier. Son accord est nécessaire pour le début des travaux de forage. Certains humanitaires vont plus loin et demande que le site du camp de Nahibly soit officiellement récupéré il érigé en site de cantonnement national en cas de sinistre. Les forages ne seront plus un investissement à perte comme le pensent déjà certains experts nationaux.
SUY Kahofi
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