Miss ou Awoulaba faite votre choix !
Les canons de beauté de la femme ivoirienne ont sérieusement évolué avec les années. Entre l’Awoulaba et la Miss, la cohabitation n’a pas toujours été paisible. Retour sur la vie tumultueuse de deux beautés qui se côtoient en Côte D’Ivoire.
L’Awoulaba. Elle est le symbole de la beauté authentique. Elle, c’est « la femme Ivoirienne de premier choix« , assurait un humoriste. La contempler est un régal pour les yeux : formes généreuses, teint d’ébène, cou strié, fessier fourni, poitrine imposante – les lolos comme on dit ici – et toujours le pagne pour meilleur allié. Face à ce canon de beauté traditionnel, la femme ivoirienne dernière génération : la Miss. Mince, élancée, le teint bronzé ou légèrement clair, et toujours habillée à l’occidental. La choco, comme elles aiment à se faire appeler. Dans ce face à face, chacune a eu son moment de gloire et de déclin. Les influences musicales ou cinématographiques y sont pour beaucoup, mais pas autant que le regard, souvent changeant, des hommes.
« Petits modèles » et « Anti-Palu »
Très longtemps, les « femmes en chair », les Awoulabas, avaient le vent en poupe. Un règne brisé net par les campagnes fortement médiatisées de lutte contre l’obésité. Le surpoids tant apprécié par l’Ivoirien, devenu un problème, les Awoulabas entraient dans une période de vaches maigres. Les temps étaient à la perte de poids : régimes, thés amincissants, sport à outrance… Par tous les moyens il fallait rejoindre le clan des « petits modèles », ces jeunes filles sveltes autour desquelles tournent désormais les hommes. « C’était la mode ! Les petits modèles qu’on appelait aussi anti-palu étaient partout. On ne voyait plus les grosses femmes. Pour plaire il fallait être mince ! », affirme Jean-Charles. On s’identifiait alors aux actrices des séries brésiliennes à succès : Dona Beija, Marimar, Rubis ou Marina pour ne citer que celles-là. Et comme si cela ne suffisait pas, voilà que les mannequins, vus ici et là dans les magazines de beauté, viennent en rajouter. Une fois les défilés investis et les podiums d’Abidjan conquis, c’en était fini des Awoulabas. Ne restait plus qu’à mettre la mode pour « femme en chair » au placard. Coup de froid chez les défenseurs de l’idée d’un concours basé sur les critères de beauté de la femme Ivoirienne traditionnelle.
Miss Lolos à le bobaraba
Les années passent, les chocos frappent le pavé. Mais c’était sans compter avec la capacité de nuisance de la musique ivoirienne. Avec quelques titres, les faiseurs de tendances vont inverser le rapport de force. Meiway lance la première charge avec sa Miss Lolo, Eloh DJ renchérit avec le Bobaraba »la femme en chair ». Ils ravivent la fierté de toutes les complexées qui se recroquevillaient dans leur coin. Les jeunes femmes aux formes développées savourent leur revanche. « Le phénomène des femmes en chair est revenu en force. On était obligé d’utiliser des artifices pour avoir une forte poitrine », déclare Marie-France. Charlatans et herboristes du dimanche commercialisaient à foison, produits et injections censés « faire grossir la poitrine et le postérieur ». Les résultats ont souvent été catastrophiques : déformations musculaires, désorganisations des cellules graisseuses et cancers se sont invités dans les processus de transformation. (postérieur). Deux hommes viennent de faire un grand pas pour
Reines de beauté
Aujourd’hui, face à l’Election Miss Côte d’Ivoire, il faut dorénavant compter avec l’Election Awoulaba. Entre les Miss et les Awoulabas, semble enfin établi l’équilibre, mieux encore…la paix. « Nul besoin de créer des problèmes là où il n’y en a pas », nous assure-t-on. « C’est vrai que ce face à face existe entre les femmes sveltes et les femmes en chair mais il n’y a pas de complexe à mûrir« , souligne Adèle. « Regardez, je suis grosse, d’aucuns diront obèse ! Je l’assume et j’en suis fière« , conclut-elle en se tournant pour nous laisser voir ses rondeurs. « Les grosses sont à la mode. Reconnaissons qu’on les jalouse. On se retourne plus pour les regarder quand elles marchent en se dodelinant. Mais je pense que les hommes ont le dernier mot », affirme Christelle. Ecoutons donc ces Messieurs. « Les femmes sont victimes de la mode occidentale, elles dénaturent l’esprit de la beauté africaine », s’insurge une partie d’entre eux. Les autres estiment par contre que « ce changement s’impose à la femme africaine moderne ». « Messieurs, ne nous attardons pas sur les formes ! », souligne Blaise en riant. Il conclura plus tard: « la femme africaine a évolué dans son style, mais le plus important c’est qu’elle soit émancipée. Mon souhait, c’est que la mode venue d’ailleurs ne la pervertisse pas, mais contribue à la faire avancer« .
SUY Kahofi
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