Football pour la paix : un concept pour parler de paix et de désarmement

Article : Football pour la paix : un concept pour parler de paix et de désarmement
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22 octobre 2012

Football pour la paix : un concept pour parler de paix et de désarmement

Les équipes mixtes lors du projet-pilote de Bonoua

Le concept « football pour la paix » a été expérimenté dans la Région des Grands Lacs avec succès. Il s’agit d’utiliser l’art et le sport principalement le football pour contribuer à la promotion de la paix. Après le Burundi, le Rwanda et la République Démocratique du Congo où cette activité a permis de détendre l’atmosphère entre jeunes et populations en conflit, la Côte d’Ivoire a décidé de l’expérimenter pour répondre au besoin du désarmement civil et de la réconciliation. Le RASALAO-CI (le Réseau d’action sur les armes légères en Afrique de l’Ouest, section Côte d’Ivoire) et son partenaire financier le GIZ (organisme de coopération Allemande) ont décidé d’appliquer ce concept à la Côte d’Ivoire. Ces deux entités viennent d’achever la phase pilote d’un projet-jeune pour la réconciliation et le désarmement civil. Il s’agit d’un séminaire de formation sur les armes légères doublé d’une activité sportive et artistique. La phase pratique du projet-pilote a été présentée à la population de Bonoua ce 21 octobre à la Place Popo Carnaval.

La naissance d’un concept unificateur

C’est en Colombie, principalement dans la ville de Medellin que nait le concept du « football pour la paix » sur l’exemple du Street football world (foot de rue). Medellin est l’une des villes au monde où la violence s’impose comme un mode vie avec des jeunes gens de 15 à 20 ans assassinés chaque jour. Autour des années 1994, le Street football donne la chance aux jeunes gens de se confronter sans armes et d’apprendre par le biais du jeu des moyens pacifiques de résolution des conflits. Un autre évènement va booster la mise sur pied du concept en lui-même. En Juillet 1994, le joueur de football Andrés Escobara est abattu d’une balle dans la rue. Le nom d’Andrés Escobara est connu par les amoureux du ballon rond. Il est en effet ce joueur sud-américain auteur d’un auto-goal lors de la coupe du monde aux Etats Unis d’Amérique.  Cet assassinat va pousser Jürgen Griesbeck, alors professeur de sociologie du sport à l’université d’Antioquia dans la ville de Medellin, à développer l’idée du « street football » autour d’une appellation nouvelle. C’est en 1996, que le projet de « Football pour la paix » voit réellement le jour à Medellin. Le concept rassemble sur le même terrain des jeunes d’horizon divers. D’un côté ceux impliqués dans des crimes ou victimes de violences de divers conflits et de l’autre des jeunes colombiens qui mènent une vie tout à fait normale.  Un an après le lancement du projet, il y avait déjà 500 équipes à Medellin et le concept s’imposait au plan national !

Un projet pilote pour la Côte d’Ivoire

Pour le cas précis de la Côte d’Ivoire, la volonté d’expérimenter ce projet nait à la suite d’un voyage de Mme KORA Gouré Bi au Rwanda. La chargée du projet GIZ – COMNAT-ALPC trouve opportun de lancer ce projet en Côte d’Ivoire dans le contexte de sortie de crise. « La cible jeune dans ce projet est importante car les jeunes sont l’avenir de ce pays. Il faut déjà enseigner ces jeunes sur les notions de fair play, de dialogue et de compromis pour qu’ils puissent en faire la promotion dans leurs communautés respectives » affirme Mme KORA. C’est donc tout naturellement que les membres de l’ONG ESEPERANCE Rwanda qui utilise déjà l’art et le sport pour promouvoir la paix ont été invité pour le partage d’expérience. Sur la portée du sport et particulièrement l’utilisation du football pour promouvoir le dialogue et la paix, Victor Emmanuel SEWABANA Secrétaire exécutif de l’ONG soutient « que le football est aujourd’hui un sport qui rassemble les masses et surtout les jeunes. A travers l’utilisation de ce sport toute la population se retrouve et surtout par la promotion du fair play les jeunes arrivent à se faire des amis ». Le concept de « Football pour la paix » est basé sur des valeurs morales et dispose de ses propres règles. « Les équipes mixtes sont composés de 6 joueurs (3 filles et 3 garçons), seules les femmes peuvent scorer, le terrain a une dimension de 20 m, deux règles de fair play sont données avant match par les équipes et il n’y a pas d’arbitre ! Les joueurs doivent apprendre seuls à dire quand il y a une faute etc. » nous explique Mme COULIBALY, secrétaire nationale chargé de l’organisation au RASALAO-CI. En plus de ces règles plutôt originales, il faut prévoir à la fin de chaque match de 10 mn un moment où les deux équipes proposent des sketchs. Pour le projet-pilote, les deux équipes ont présenté des sketchs sur le désarmement et la cohésion sociale au public de Bonoua composé des élus politiques et administratifs de la cité. Un espace de culture générale est aussi prévu pour tester les connaissances des uns et des autres sur les thématiques abordées lors des sketchs.

Quel avenir pour le projet ?

En Côte d’Ivoire, le projet « Football pour la paix » est également conduit avec le soutien de la COMNAT-ALPC, (la Commission Nationale de Lutte contre la Prolifération des Armes Légères et de Petits Calibres). La formation sur le désarmement civil par le sport et l’art est orientée en premier vers les relais communautaires du RASALAO-CI. Leur rôle sera d’organiser dans chacune de leurs communautés des activités artistiques et sportives à même d’asseoir un climat de confiance entre les différentes composantes de la société. KONAN Amenan Mireille et CAMARA Papa respectivement point focal RASALAO-CI à Aboisso et Danané « estiment qu’il faut très vite expérimenter cette nouvelle approche du sport auprès des jeunes. « Football pour la paix » peut être également un moyen de véhiculer tous les messages de sensibilisation à l’endroit des jeunes ». Sensibilisation sur le SIDA, la drogue, les Violences basées sur le genre… »Football pour la paix » peut permettre de véhiculer des messages autour de tous ces sujets. Pour sa part, Karamoko Diakité, le Président du RASALAO-CI soutient que son organisation « n’entend pas s’arrêter à cette phase pilote. Bientôt des équipes du RASALAO-CI sillonneront le pays pour inculquer cette nouvelle méthode de promotion du dialogue aux jeunes ». Les jeunes Ivoiriens ont pris une part active dans la récente crise qui a secoué le pays. C’est donc par eux qu’il faut commencer la sensibilisation pour le dépôt volontaire des armes. La jeunesse de Bonoua, localité qui a accueilli la phase pilote du projet se réjouit de cette initiative et espère une adhésion de toute la jeunesse Ivoirienne. AYEMOU Narcisse Président central des jeunes de Bonoua estime « que le GIZ, la COMNAT-ALPC et le RASALAO-CI viennent de jeter les bases d’un important projet et qu’il est du devoir de chaque groupement de jeune de s’approprier le concept de « Football pour la paix ». Il s’agit d’une opportunité de parler de paix entre jeunes à travers le sport roi qu’est le football ».

SUY Kahofi

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