14 décembre 2011

Les gombotiers de midi

Taxis communaux (wôrô-wôrô) dans la commune d’Adjamé/Abidjan

La pige quotidienne des chauffeurs de taxi en attendant des jours meilleurs

Dans l’univers des chauffeurs de taxi abidjanais, la bataille pour la recette fait rage. Pour s’en sortir, il est hors de question de laisser le moteur au repos. Alors quand on est fatigué, on fait appel à ses copilotes pour assurer la relève…

En Côte d’Ivoire, le mot gombo ne désigne pas seulement le légume. Dans le jargon urbain Ivoirien, il désigne aussi un petit boulot. Quel que soit le milieu où l’on se trouve, il y a des gombos ! Celui qui fait un gombo est un gombotier, un gomboïste ou même gomboman selon les appellations et la connotation voulue. En Nouchi (argot ivoirien), toutes les transformations sont possibles. L’univers des chauffeurs de taxi n’échappe pas à la logique du gombo !

Gombotier

Ici, les gombotiers sont des adjoints, souvent des amis, qui n’ont pas encore la chance d’avoir un taxi à ‘’eux-mêmes’’. Certains sont des copains de quartier qui savent conduire mais qui n’ont pas d’emploi. D’autres des mécaniciens qui veulent se faire la main ou même des chauffeurs de taxi qui viennent de perdre leur travail. Tout ce petit monde se côtoie dans les différentes gares routières  d’Abidjan en attendant qu’une place se libère. Wôrô-wôrô ou taxi compteur, les gombotiers sont partout ! « Il y a une certaine solidarité dans notre milieu : on peut laisser le volant à un ami qui a un problème d’argent pour qu’il puisse s’en sortir, certains de nos petits frères du quartier ont besoin de savoir conduire, ainsi de suite. C’est la raison pour laquelle nous acceptons les gombotiers », souligne Isaac, chauffeur de wôrô-wôrô. Ne nous trompons pas, le gombo n’a pas seulement un caractère social, c’est avant tout une histoire de sou ! « Quand tu descends à midi pour te reposer ou le soir avant d’arrêter le taxi, tu peux t’arranger avec un ami pour qu’il roule : tu lui imposes une certaine somme et le surplus lui revient », soutient Souleymane, chauffeur de taxi compteur. A la question de savoir si les gombotiers s’en sortent, voici sa réponse : « Ils sont les seuls à pouvoir te répondre (rires) ».Sur une gare routière on remarque facilement les gombotiers : ils flânent d’un hangar à l’autre et échangent des politesses avec « les chauffeurs titulaires ». Le permis de conduire mis en pochette. « On attend un coup de fil pour prendre la place de quelqu’un pour une heure ou deux. On ne peut pas se plaindre, on s’en sort. Je dirais qu’il est préférable d’avoir 3000 (4,51 €) ou 5000 f CFA (7,75 €) ici que de rester à la maison », déclare Privat, un gombotier.

Les gros dangers du gombo

Le gombo au volant, n’est pas sans risque. Ni pour le chauffeur titulaire, ni pour le gombotier lui-même. En effet, tous n’ont pas le permis de conduire. Sur le bitume, ils multiplient les incivilités et refusent généralement d’obtempérer face à la Police. Conduire sans permis est un délit passible de 3 à 5 mois d’emprisonnement ferme. Le chauffeur titulaire quant à lui,  peut être écroué pour complicité ou négligence. « Moi personnellement je laisse mon véhicule seulement à quelqu’un qui a le permis, les autres c’est trop dangereux », souligne Brice Clément, chauffeur de taxi. « Si vous faites un tour au tribunal ou à la police, c’est sûr que vous allez voir qu’un nombre important de jeunes ont été pris sans permis et les arrestations sont importantes au niveau du radar », souligne Norbert, un bénévole souvent commis au point radar

SUY Kahofi

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