Crise post-électorale Grand-Bassam : attention aux dérives ethno-religieuses !

18 décembre 2010

Crise post-électorale Grand-Bassam : attention aux dérives ethno-religieuses !

Les musulmans ont été pris pour cible à Grand-Bassam (photo d'archive)

Ce vendredi 17 décembre les partisans du Docteur Alassane Ouattara étaient terrés dans leurs domiciles respectifs, tenus en respect par les armes des FANCI fidèles à Laurent Gbagbo. Certains de leurs amis ont dû dormir dans l’enceinte de l’hôtel du Golf jalousement gardé par prêt de 800 militaires de l’ONUCI. D’autres quittaient par petits groupes le siège du RHDP où ils n’ont pas fermé l’œil de peur d’être surpris par ‘’les gars’’ de Gbagbo. A part quelques tirs sporadiques autour d’Abobo tout fut calme à Abidjan. C’est seulement à 25 km d’Abidjan que la poudrière va s’embraser.

Vendredi 17

Il est 13 h 05 mn, dans une mosquée de la cité balnéaire de Grand-Bassam quartier FAR; les musulmans viennent de finir l’ablution. Ils s’entassent dans l’enceinte de l’édifice sacré pour la prière. C’est en ce moment qu’arrive une patrouille des Forces de Défense et de Sécurité (FDS). Une grenade lacrymogène est dégoupillée par un des hommes en uniforme et projetée dans la mosquée. Certains musulmans accroupis reçoivent des éclats après l’explosion du projectile. La communauté se sent offensée et la colère monte. « C’est une affaire politique, l’islam est une religion » lance un fidèle. « Ils vont nous dire où ils ont vu un militant du RHDP ou un rebelle dans notre mosquée » soutien avec rage un autre jeune. La riposte ne se fait pas attendre. Le domicile du commissaire de Police est pillé et son véhicule de commandement incendié. Deux FDS sont retenus en otage ! L’armée menace et procède à des tirs de sommation : loin d’être effrayé, les musulmans indignés ne reculent pas. Il faut dialoguer pour ne pas mettre en danger les deux FDS aux mains des nombreux hommes et femmes venus désormais crier leur indignation devant les hommes en arme. Les deux hommes sont libérés mais la foule en colère est difficile à contenir. Les FDS font appel à des renforts d’Abidjan. Les tirs de sommation se métamorphosent en tir à balles réelles sur la foule en colère. Le bilan fait état d’un mort et plus d’une dizaine de blessés convoyés vers l’hôpital par la Croix Rouge. Loin de s’arrêter, les FDS pénètrent dans des domiciles bastonnant tout ce qui porte un boubou, prie Allah ou possède un nom à consonance nordique. Une vingtaine de personnes couvertes d’hématomes et de blessures sont de nouveau admises à l’hôpital. Des tirs d’armes automatiques ont été entendus pendant plusieurs heures et même très tard dans la soirée.

Samedi 18

Ce samedi la violence n’est pourtant pas retombée en ce jour. Des femmes ont décidé de marcher sur le commissariat de police. Certaines étaient toute nues et scandaient des propos de malédiction à l’endroit du président Laurent Gbagbo. Elles ont été battues mais ont refusé de regagner leurs domiciles. Au prétexte d’un ratissage pour retrouver des armes et des éléments infiltrés, plusieurs personnes ont été arrêtées par les FDS. Le Maire de Grand-Bassam a exigé et obtenu la libération des détenus. Il a par ailleurs demandé que les renforts policiers de la Brigade anti-émeute et de la Compagnie Ivoirienne de Sécurité soient retirés de la ville. A 11 h 50 ce samedi, la situation était redevenue relativement calme mais autour de 16 h 50 un véhicule de la RTI a été incendié. Les manifestants reproche à la télévision d’être une chaîne de propagande à la solde de Laurent Gbagbo.

Les évènements de Grand-Bassam doivent interpeller les Ivoiriens sur les risques de dérives ethno-religieuses. La Côte d’Ivoire n’a pas encore fini avec les vieux démons de la division politique que certaines personnes, au prétexte d’avoir une arme en main veulent retourner des Ivoiriens contre d’autres Ivoiriens. Les problèmes politiques se gèrent sur le plan politique et rien ne sert de taxé un musulman, un dioula ou un nordiste de rebelle. Vivement que ce genre d’attitudes soient proscrites du comportement des hommes en arme au moment où l’on recherche des solutions pacifiques au problème Ivoirien.

Suy Kahofi

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