Que peut-on dire avec une caricature ? (FMML 2015)

24 mars 2015

Que peut-on dire avec une caricature ? (FMML 2015)

Dessin de presse, caricature…que peut-on dire, que peut-on dessiner ?
Dessin de presse, caricature…que peut-on dire, que peut-on dessiner ?

L’attaque du siège de Charlie Hebdo en France relance le débat sur la liberté d’expression par le canal du dessin de presse. Une question taraude désormais les dessinateurs et les lecteurs : peut-on tout dire avec le dessin ?

Le dessin de presse et plus généralement la caricature sont un outil de compréhension de la ligne éditoriale d’un organe. Il répond certes à des besoins d’illustration, mais permet aussi et surtout de détendre le lecteur et de l’aider à comprendre l’actualité. Il est aussi « un indicateur clé pour jauger la liberté d’expression dans un pays » selon le caricaturiste marocain Khalid Gueddar. Malheureusement ces dix dernières années dans le monde, les dessins de presse ont créé des situations de colère populaire, d’émeute et d’emprisonnement pour les dessinateurs. On reproche ici et là aux quotidiens satiriques des atteintes au sacré, à l’honorabilité d’un dirigeant politique ou même d’atteinte à la pudeur.

Pour le dessinateur de presse brésilien Carlos Henrique Lattuf, toutes ces situations naissent d’une incompréhension du dessin de presse et d’une volonté malheureuse de certains organes d’attiser les haines.

« Une caricature d’Israël – je ne parle pas des juifs – serait à l’origine d’un scandale en France. Alors qu’une caricature du massacre des Palestiniens n’aura aucun effet dans le même contexte. Une caricature du prophète Mohamed ne choquera personne dans un pays donné, mais fera descendre toute la population dans la rue dans un autre pays » nous explique le dessinateur.

Le dessin de presse ne s’apprécie donc que dans un contexte sociopolitique précis. Le langage du dessin étant universel, il est souvent difficile de prévoir la réaction d’un lecteur qui découvre le dessin au bout du monde par la magie d’Internet. Voici pourquoi comme tous les genres journalistiques, le dessin de presse dans un contexte local (national) ou international doit faire l’objet d’un certain cadrage. Si de nombreux dessinateurs acceptent ce principe, ils sont plutôt divisés dans la faisabilité.

Pour Sebastien Boistel du quotidien satirique « Le Ravi« , « le dessinateur de presse est libre de tout dire et de tout écrire ». La seule « censure » qu’il peut s’imposer est sa propre responsabilité vis-à-vis de ces lecteurs. Les notions de sacré, de noblesse, de sensibilité politique ou religieuse, ne sauraient être un frein à la liberté du dessinateur. C’est bien « cette liberté totale qui par moments entraîne d’énormes dérives » selon le caricaturiste marocain Khalid Gueddar. Le dessin de presse comme la pratique générale du journalisme doit être encadrés par les lois.

« Le dessin de presse doit servir à critiquer et dénoncer mais pas attiser les haines. Quand on dessine le prophète Mohamed nu ou sous les traits d’un animal, la seule chose qu’on recherche c’est choquer, c’est créer des tensions inutiles et non informer ! Et c’est bien ce que le dessinateur doit éviter » estime Carlos Henrique Lattuf.

Pour le respect de la liberté de la presse « on peut donc tout dire avec le dessin mais dans le respect des lois, le respect de la liberté de l’autre et dans la diversité ».

SUY Kahofi avec Flamme d’Afrique (Forum mondial des médias libres Tunis)

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Commentaires

Benjamin Yobouet
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Je suis tout à fait d'accord avec toi: "Le dessin de presse doit servir à critiquer et dénoncer mais pas attiser les haines." ...

Kahofi SUY
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Dans un monde où certains extrémistes cherchent de la publicité gratuite autant ne pas leur prêter le flan!