Côte d’Ivoire : Le conseil de sécurité reconduit l’embargo sur les armes

29 avril 2012

Côte d’Ivoire : Le conseil de sécurité reconduit l’embargo sur les armes

Siège de l'ONUCI ex-hôtel SEBROKO

Le Conseil de sécurité des Nations Unies a adopté, jeudi 26 avril 2012, la résolution 2045 qui maintient, jusqu’au 30 avril 2013, ses sanctions à l’égard de la fourniture, la vente ou le transfert d’armes à la Côte d’Ivoire ainsi que l’exportation du diamant brut  en provenance du territoire ivoirien.

La résolution comporte des exemptions permettant au Gouvernement ivoirien d’entraîner et d’équiper ses forces de sécurité, et de doter la police et la gendarmerie des armes et munitions nécessaires au maintien de l’ordre. Les exemptions traduisent également un souci de permettre une réponse proportionnée du Gouvernement aux menaces contre la sécurité de la population. La résolution explique les procédures à suivre par le Gouvernement pour bénéficier de certaines de ces exemptions accordées par le Conseil, qui salue les efforts des Ivoiriens pour soutenir la réconciliation nationale et la consolidation de la paix et se félicite de l’amélioration de la coopération que le Gouvernement a accordée au Groupe d’experts sur l’embargo. Les autorités ivoiriennes ont salué la résolution, et la considèrent, selon le Représentant Permanent de la Cote d’Ivoire auprès des Nations Unies, M. Youssoufou Bamba, comme « un encouragement du Conseil de sécurité à la Côte d’Ivoire à poursuivre ses efforts en vue de surmonter les défis importants restants ».

Exemptions : Matériel non-létal, matériel létal RSS…

Au chapitre des exemptions, la résolution stipule que le régime de sanctions ne s’appliqueront plus  ni à la fourniture de services de formation, de conseils et de compétences spécialisées en rapport avec les fonctions de sécurité et militaires, ni à la fourniture de véhicules civils aux forces de sécurité ivoiriennes. La prohibition de la fourniture, la vente ou le transfert d’armes ne s’appliquera pas non plus « aux fournitures destinées exclusivement à l’appui de l’Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire (ONUCI) et des forces françaises qui la soutiennent, ou à l’utilisation par celles-ci ». Sont également exempts, le « matériel militaire non létal destiné exclusivement à un usage humanitaire ou à des fins de protection  ainsi que le matériel de police non létal destiné à permettre aux forces de sécurité ivoiriennes d’utiliser une force appropriée et proportionnée afin de maintenir l’ordre. Cependant, dans les deux cas, une notification préalable doit être faite au Comité de sanctions. De même, la prohibition ne s’applique pas « aux armes et autres matériels létaux destinés aux forces de sécurité ivoiriennes dans le seul but d’appuyer le processus de réforme du secteur de la sécurité ou d’être utilisés dans le cadre de ce processus ». Dans ce cas, un accord préalable du Comité est requis. La résolution souligne que les notifications ou demandes préalables doivent être accompagnées de toutes les informations nécessaires, y compris l’utilisation à laquelle le matériel est destiné, l’utilisateur final, les caractéristiques techniques et le nombre d’articles à expédier ainsi que, le cas échéant, le fournisseur, la date envisagée de livraison, le mode de transport et l’itinéraire de transport. Le Conseil exhorte le Gouvernement ivoirien à permettre au Groupe d’experts et à l’ONUCI d’avoir accès aux équipements faisant l’objet de dérogations au moment de l’importation de ces équipements et avant qu’ils ne soient livrés aux utilisateurs et souligne que le Gouvernement devra marquer les armes et les matériels connexes à leur entrée sur le territoire de la Côte d’Ivoire et en tenir un registre.

Préoccupations : DDR, RSS, combattants illégaux, mercenaires…

Par ailleurs, la résolution exprime la préoccupation du Conseil de Sécurité face à l’inachèvement de la Réforme du Secteur de la sécurité (RSS) et du programme de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR), et à la circulation des armes, qui font peser une lourde menace sur la stabilité du pays. Toutefois le Conseil « accueille  avec satisfaction la création au sein du Gouvernement d’un groupe de travail sur la RSS et le DDR ainsi que les autres actions menées pour faire résolument face à ces problèmes ». La résolution réitère la ferme condamnation par le Conseil de « toutes violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire en Côte d’Ivoire » et « toutes violences contre les populations civiles, y compris les femmes, les enfants, les personnes déplacées et les étrangers, ainsi que toutes autres exactions ou atteintes aux droits de l’homme ». Elle souligne que les auteurs de tels actes doivent être traduits en justice, que ce soit devant des tribunaux internes ou des tribunaux internationaux, et se félicite de l’étroite coopération du Gouvernement ivoirien avec la Cour pénale internationale dans ce contexte.

Le Conseil se déclare « préoccupé par les constations du Groupe d’experts concernant la mise en place d’un système de taxations illégales, l’aggravation de la criminalité […] et l’insuffisance des moyens humains et matériels affectés au contrôle des frontières ». Le Conseil « exhorte tous les combattants armés illégaux ivoiriens, y compris ceux se trouvant dans des pays voisins, à déposer immédiatement les armes ». Il « encourage l’ONUCI, dans les limites de son mandat, de ses capacités et des secteurs dans lesquels elle est déployée, à continuer d’aider le Gouvernement ivoirien à collecter et à entreposer ces armes et à enregistrer toute information pertinente les concernant ». Et il « demande au Gouvernement ivoirien […] de veiller à ce que ces armes soient neutralisées ou ne soient pas distribuées illégalement ». Le Conseil de sécurité se déclare « profondément préoccupé par la présence en Côte d’Ivoire de mercenaires, venant notamment de pays voisins, et invite les autorités ivoiriennes et libériennes à coordonner leur action pour régler ce problème ». Il encourage l’ONUCI et la Mission des Nations Unies au Libéria (MINUL) à continuer, dans les limites de leurs mandats, capacités et zones de déploiement respectifs, à coordonner étroitement l’assistance fournie aux Gouvernements ivoirien et libérien, respectivement, pour la surveillance de leur frontière, en accordant une attention particulière aux mouvements de combattants et aux transferts d’armes.

Libre accès pour le groupe d’experts sur l’embargo

La résolution réitère qu’il est nécessaire que les autorités ivoiriennes assurent le libre accès du Groupe d’experts sur l’embargo, l’ONUCI et la Force Licorne, aux cargaisons des avions et de tout véhicule de transport utilisant les ports, aéroports, terrains d’aviation, bases militaires et postes frontière, ainsi qu’à toutes les armes et munitions et tout matériel connexe de toutes les forces de sécurité armées. Elle « demande aux autorités ivoiriennes de lutter contre les systèmes de taxation illégaux qui perdurent, de prendre les mesures nécessaires pour rétablir et renforcer les institutions concernées, et de continuer à déployer des agents de douane et de police des frontières dans tout le pays … ». Par ailleurs, la résolution engage le Gouvernement ivoirien à ratifier et appliquer la Convention de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) sur les armes légères et de petit calibre, leurs munitions et autres matériels connexes. Un bilan de mi-parcours des mesures contenues dans la résolution devra être réalisé au plus tard le 31 octobre 2012.

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